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dimanche 16 août 2009
Lettres de Baghdad
Rencontre avec des calligraphes
Lettres de Baghdad
S’il est un art majeur à qui Baghdad a donné ses lettres de noblesse c’est sans conteste la calligraphie arabe.
Technique de l’écriture alors que l’imprimerie tardait à voir le jour, la calligraphie est devenue art sous les plumes des artistes irakiens, tels que Haïder Rabee, Abdreda Bahia Daoud ou encore Ayad Al Husseïni. Tous trois sont docteurs universitaires, enseignants et chercheurs à l’Institut des beaux-arts de l’université de Baghdad. Tous trois sont également des artistes accomplis. Leur CV, des litanies interminables qui rappellent les multiples prix décrochés et œuvres que l’ont peut retrouver un peu partout dans le monde.
La question, bien entendu, était de savoir s’ils sont considérés comme des artistes officiels. Il faut bien reconnaître que la calligraphie est un art particulier. La gloire du régime irakien n’ayant pas sa place est peut-être rarement mise en avant si ce n’est au travers des banderoles que l’on croise un peu partout dans la ville. Mais les banderoles ne sont pas de l’art…
Texte sacré qui fait de la lettre un message quasi spirituel, les calligraphes se sont, du fait de la nature même de leur travail, confinés dans l’affinement des techniques et de l’esthétique du texte sacré. Pourquoi le recours à la calligraphie ? "C’est d’abord une esthétique issue des règles mathématiques et des origines", indique Al Husseini qui a, aussi, requalifié la calligraphie en recourant à la scultpture. Cet artiste, né à Mossoul en 1956, a étudié en Turquie notamment. Il est, entre autres, concepteur de polices de caractères arabes pour l’informatique.
Seule référence : le Coran. Pourquoi alors ne pas mettre "en texte" des poèmes par exemple ? "Le caractère prend son allure sacré du fait que l’on exerce sur lui un effort esthétique inspiré", explique Al Husseïni. Faut-il pour autant être musulman pour avoir recours au texte sacré. "Faux", s’insurge Haïder Rabee "des artistes chrétiens qui sont aussi des calligraphes assurés ont travaillé sur le texte du Coran. Ils reconnaissent ,eux-mêmes, ne pas avoir la même inspiration s’ils exécutaient des textes profanes", souligne-t-il . Haïder Rabee fait partie de la nouvelle génération d’artiste. Né en 1962 dans la ville chiite de Nadjaf, il a fait de la calligraphie un moyen de communication. Il passe ainsi de la peinture aux logos ou aux affiches.
Bien entendu, on ne peut faire l’impasse sur la situation de ces artistes alors qu’ils vivent sous embargo depuis douze ans maintenant. "On a dû revoir nos priorité" explique Al Husseïni. " Cela dit, on ne s’est pas arrêté de travailler " indique Abdreda. De son nom d’artiste Rodane Bahia, il a signé un Coran calligraphié en Naskh et Thuluth pour la fondation Ramzi de Londres. Il a réalisé l’œuvre entre 1988 et 1993.
"J’écrivais à la lumière du jour et la situation d’après- guerre m’a beaucoup aidé. Le pays était en pleine reconstruction et il n’ y avait rien à faire pour moi si ce n’est de me trouver une occupation intéressante", raconte-t-il.
Mais au-delà de la guerre et de l’embargo se sentent-ils libres ces artistes ? "Avant la liberté je crois que nous cherchons d’abord la reprise économique", esquive Al Husseïni.
A.E.
In le quotidien l'Actualité Alger novembre 2002
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